Le CNRS a un certain nombre d’accords avec des universités étrangères permettant la mise en place de nouvelles collaborations. Un de ces accords appelé « projets de recherche collaboratif » (PRC) a été récemment conclu avec l’université de Melbourne en Australie, et c’est dans ce cadre que j’ai eu (avec Jeff McCallum) un financement pour un projet (« Spectromech ») visant un étude expérimental de l’effet d’une contrainte mécanique sur les propriétés électroniques des défauts intrinsèque à l’interface entre le silicium et son oxyde.
En termes purement scientifiques (et non géographiques !) l’Australie est un petit pays qui souffre d’une manque de masse critique de chercheurs dans maint domaine de la science. Les scientifique compare souvent l’Australie avec le Pays Bas, pays dont la population et le produit national brut sont assez semblable à ceux de l’Australie, mais qui ont des profils scientifique très différents. En effet le Pays Bas bénéficie énormément de la présence limitrophe de plusieurs grands pays scientifiques dont la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne. Pour combattre son isolation le gouvernement fédérale d’Australie suivre une stratégie de bien (voir même très bien) financer certaines domaines au prix d’un soutien très réduit (voir même nul) dans d’autres. Il suffit, pour identifier les domaines bien financées de lire les noms des « Centres of Excellence » dont il y en a neuf : ‘All Sky Astrophysics in 3 Dimensions’, ‘Australian Biodiversity and Heritage’, ‘Climate Extremes’, ‘Engineered Quantum Systems’, ‘Exciton Science’, ‘Future Low-Energy Electronics Technologies’, ‘Gravitational Wave Discovery’, ‘Population Ageing Research’, and ‘Quantum Computation and Communication Technology’.
Le groupe mené par Jeff McCallum fait partie du consortium ‘Quantum Computation and Communication Technology’ (CQC2T) piloté par l’Université de New South Wales à Sydney. La raison d’être de ce consortium est de construire un ordinateur quantique de type Kane (voir l’article par Kane qui le propose : Nature 393, 133 (1998)) dans lequel les qubits se réalisent sur le spin nucléaire de défauts dans les semi-conducteurs. Actuellement deux matériaux sont à l’ordre du jour ; le donneur phosphore dans le silicium et le centre NV dans le diamant. Le rôle de Jeff McCallum dans le CQC2T est en tant qu’expert sur la spectroscopie électronique de défauts, et c’est pour cette même expertise que je l’ai sollicité.
Au laboratoire PMC nous étudions l’effet de contraintes mécaniques sur les propriétés électroniques de nanostructures en silicium, et plus spécifiquement les nano-membranes et les nanofils. Heng Li, dans le cadre de sa thèse (2016-2019), a récemment observé un changement sous contrainte de l’admittance des nano-membranes bien au-delà de ce qu’on observe habituellement dans le silicium massif. La symétrie (paire) de l’effet en contrainte indique qu’il est peut-être dû à un piégeage de charge sur les défauts intrinsèque de l’interface silicium/oxyde. L’image qualitative pour l’instant, est que la contrainte modifie l’énergie d’activation de ces défauts mais une confirmation quantitative de ceci requiert des mesures spectroscopiques de défauts sous contrainte. Ainsi s’est fixé l’objectif principal de « Spectromech » sur lequel travail Chris Lew, étudiant en M2 à Melbourne.
Il est intéressant de noter (même si c’est moins évident de première vue) qu’une contrainte mécanique peut également influencer la dynamique de spin des électrons et des noyaux. C’est pour cette raison que le CQC2T tente actuellement de contraindre mécaniquement leurs qubits. La dynamique de spin est une domaine dans laquelle tous les membres de l’équipe EPS sont experts, et j’ai donc espoir que « Spectromech » ouvrera d’autres opportunités collaboratives avec l’Australie.
Alistair Rowe